Le centenaire de la guerre 14-18

RENÉ BAZIN ET LE CENTENAIRE DE LA GUERRE 14-18

« La publication de ces récits, c’est un peu ma part de guerre. Ne pouvant me battre parmi les soldats, j’ai tâché du moins :
– de soutenir les courages,
– de célébrer les actes d’héroïsme et la foi de nos armées
– et de montrer la force d’une France unanime,
…autant de raisons d’espérer la victoire et la paix française…. »
Récits du temps de la guerre, 1915

En parcourant la soixantaine d’ouvrages, écrits par l’académicien, entre 1880 et 1930, on constate l’influence considérable de la 1ère guerre mondiale dans ses essais, ses récits de voyages, ses biographies ou encore ses contes de jeunesse. Dans tous ces types d’ouvrages, on peut facilement recenser plusieurs titres qui abordent, de façon parcellaire ou complète, cette période essentielle et cruciale pour notre pays. Au total, on peut dénombrer une quinzaine de livres, soit le quart de ses publications, qui abordent directement la question de la guerre : sa montée en puissance inexorable, les années terribles de 14-18, vécues au front et à l’arrière dans les familles, puis ses conséquences immédiates dans la décennie 1920/1930.

Dès les années 1880, le tout jeune écrivain discerne bien dans ses premiers écrits les causes prévisibles et la venue probable d’un prochain conflit majeur avec l’Allemagne. Après la défaite humiliante de 1870, le climat de revanche se développe de façon bien explicable ; d’autant plus qu’il ne peut que s’accentuer, suite à l’échec durable des visées monarchistes depuis la mort du Comte de Chambord en 1883 ; puis avec les crises successives du Boulangisme et des politiques anticléricales et sectaires de l’époque. R. Bazin publie en 1901 un livre célèbre « les Oberlé », le roman de « la patrie blessée » qui va connaître un immense succès (plus de 400.000 exemplaires). C’est bien ce roman patriotique qui va ouvrir à l’écrivain les portes de l’académie française, dans un climat international, bien marqué à cette époque par l’environnement « prussien ». Outre ce livre, il faut citer aussi les titres suivants, qui évoquent la tension croissante avec l’Allemagne : « Croquis de France et d’Orient 1899, Le guide de l’Empereur 1901, le Duc de Nemours 1905 et la Douce France 1911 ».
Le 3 août 1914, l’Allemagne déclare la guerre à la France. Suite à la mobilisation générale, les deux fils et les trois gendres de l’académicien rejoignent aussitôt les unités combattantes.
Il est facile d’imaginer alors les préoccupations de l’écrivain, âgé alors de 61 ans. Comme le précise la présentation ci-dessus de cet article, R. Bazin va alors s’engager à fond dans « un combat littéraire ». Il multiplie articles de presse dans les journaux de l’époque, chroniques du temps de guerre, études diverses et conférences. Tous ces écrits concernent, à la fois, le front et aussi la vie quotidienne à l’arrière. Ils seront ultérieurement regroupés et publiés sous forme d’ouvrages ; en voici quelques titres : « Les récits du temps de la guerre 1915, Aujourd’hui et demain 1916, la Campagne française et la guerre 1917, la Closerie de Champdolent 1917, les nouveaux Oberlé 1919 ». Il convient de souligner la diversité des lieux évoqués dans tous ces récits : de l’Alsace à la Lorraine et à la Meuse, de la région du Nord à la Belgique et au Royaume Uni, nos alliés ; de la Vendée à la Bretagne, sans oublier les autres régions de France, notamment la Provence.
Le 11 novembre 1918, alors que le Maréchal Foch, généralissime des armées alliées, signe enfin l’armistice avec l’Allemagne à Rethondes, on peut imaginer le climat d’apaisement et d’immense joie qui règne alors dans la demeure familiale de R. Bazin aux Rangeardières – comme dans toutes les familles à nouveau réunies – . Enfin, la paix retrouvée ! C’est dans ce lieu même que René Bazin recevra Ferdinand Foch, avec lequel il aura des liens amicaux et réguliers. Il partage avec lui, tout au long de la décennie 1920-1930, ses réflexions sur les ambigüités évidentes des traités de paix, signés à Versailles en 1919, avec 28 Etats et la SDN.
Au cours de cette période, R. Bazin publie encore plusieurs ouvrages, profondément marqués par les conséquences de la guerre : « Charles de Foucauld 1921, Il était quatre petits-enfants 1922, Baltus le Lorrain 1926 et Magnificat 1931 ».
En relisant les ouvrages, évoqués ci-dessus, on peut mesurer l’intensité et la permanence de l’attachement de l’académicien à son pays, à la terre des pères, à la « Douce France » ; livre dans lequel il écrivait :
« Il est nécessaire aujourd’hui de montrer aux Français pourquoi nous devons aimer la France et ne jamais désespérer d’elle…La France est appelée douce à cause de sa courtoisie, de sa finesse et de son cœur joyeux…Mais la Douceur n’est pas faible, elle n’est pas timide. La Douceur est forte. La Douceur est armée pour la justice et pour la paix …N’ayez pas peur de la guerre. Priez pour qu’elle soit épargnée à notre pays, mais si elle est déclarée, alors, jetez-vous-y ».
La Douce France, 1911
Ces lignes nous parlent encore aujourd’hui ; elles ne cessent d’étonner par leur actualité et la justesse de leur discernement.

Le 3 janvier 2014 Jacques Richou

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